Funérailles de Celeste - 30/01/1459

[Virargues, matin du 30 janvier 1459]

Il est des choses qu'une personne ne peut appréhender à moins d'en perdre toute raison.
Le cerveau et le coeur humains ont en commun d'être d'extraordinaires mécaniques qui entrent en sur-régime dès que la tension devient à se point intolérable que le corps et l'esprit menacent ensemble de flancher.
Lorsque Héri avait fait irruption à la cérémonie d'allégeance au Duc Petitrusse pour lui annoncer que sa soeur était au seuil de la mort, quelque chose s'était définitivement brisé en elle.
Elle avait cru en sentant son coeur se déchiqueter, que son âme s'était évaporée alors que sa soeur rendait son dernier souffle.

Seulement, son corps ne l'avait pas entendu ainsi.
Sa sécurité personnelle s'était déclenchée, préservant son âme de la folie qui menaçait de la frapper tant son chagrin était intense, profond comme les abysses, aussi brûlant que les flammes des volcans d'Auvergne, aussi puissant que le raz-de-marée le plus dévastateur.

Son coeur n'était plus qu'un vaste champ de ruine mais elle était toujours là, debout, ou presque.
Quelque chose en elle était mort avec sa soeur, mais la vie continuait pour elle, malgré tout.
Et aujourd'hui, elle avait l'horrible tâche de mettre sa soeur en terre, chez eux à Virargues, après une cérémonie probablement intimiste à Montluçon, étant donné que la chapelle du fief n'était pas encore consacrée.

Ce matin là, le ciel avait joint ses larmes aux leurs et déversait sa pluie glaciale par litres, détrempant en quelques secondes tout ce qu'elle touchait, un temps parfait pour un enterrement...

Le château de Virargues n'eut aucun mal à se réveiller, peu de monde s'était en fait endormi la veille au soir, perturbé par la triste cérémonie du lendemain.
Et tôt, trop vite, le jour s'était levé, morne matin hivernal déprimant.

Le corps de Celeste fut transporté de sa chambre où elle était veillée sans discontinuer depuis 3 jours, parfaitement conservée par la fraicheur ambiante de la pièce non chauffée.

Sakura l'avait revêtue d'une tenue qu'elle avait spécialement commandé pour elle.
La commande avait prit du retard dans la livraison, et finalement, par une ironie mordante du sort, le cadeau qu'elle désirait lui offrir pour Noël s'était transformé en vêtements funéraires.

Qu'elle était belle...
Elle reposait, les traits détendus, comme si un sourire léger comme la plume effleurait ses lèvres purpurines.
Un dernier coup de brosse sur ses cheveux encore soyeux, la Virargues avait reculé pour mieux juger du travail avant de s'effondrer à nouveau, en proie à une nouvelle crise de larmes incontrôlable.



Le cortège funéraire s'était ébranlé, mené en tête par le coche dans lequel Héri, Camille et Seve avaient trouvé abri, suivit par le chariot couvert abritant le cercueil. En queue de convoi, le personnel du château, très attaché à Celeste qui leur avait témoigné respect voire amitié de son vivant.

Pour sa part, elle était partie à cheval.
Galoper lui avait fait du bien, peu important la pluie et le vent.
Arrivée avant tout le monde, elle avait fini de tout préparer.

[Montluçon, église Sainte Gabrielle]

Certains villageois qui l'avaient connu viendraient-ils?
Son coeur se serra encore un peu plus...
Où était-il en ce moment?
Pensait-il encore à elle ne serait-ce qu'un petit peu?
Viendrait-il dire adieu à celle qui l'appelait M'sieur Cal?
Calentot... son filleul... il lui manquait tant...

Au loin, le son des sabots claquant sur les pavés résonna sur la place de l'église, tandis que finalement, le convoi funéraire approchait, il était temps pour les au-revoir.

Le coche noir s'arrêta en bas du parvis, en descendirent quatre hommes costauds.
Non pas que sa soeur adorée pesait lourd, mais le cercueil lui, si.
Saisissant chacun un coin, il hissèrent le lit funéraire de bois sur l'épaule, et en pas uni, montèrent les marches du parvis, s'arrêtant devant elle pour une pause suivie d'un signe respectueux de la tête.
Elle n'était pas seulement diaconesse en ce jour, c'était également la famille la plus proche de la défunte.

Ils entrèrent dans l'église et gagnèrent le coeur où un catafalque de marbre blanc avait été porté - non sans mal - aux pieds de l'autel.
De chaque côté, d'immenses bouquets de fleurs blanches encadraient le cercueil.
Les quatre hommes se regroupèrent dans un petit coin de l'église pour attendre la fin de la cérémonie en silence.

A leur suite entrèrent ceux qui manifestement, avec les quatre parfaits inconnus embauchés pour porter le cercueil et le descendre dans la fosse à Virargues, seraient les seuls à être venus dire au revoir à Celeste, en compagnie du personnel de leur maisonnée... en tout, moins d'une dizaine de personnes sans compter les porteurs.
Pas un seul de ses amis n'avait fait le déplacement pour dire au revoir à sa soeur.
Pas un seul membre du conseil municipal alors même qu'elle avait été l'une des leurs!
Elle eu tout à pitié pour Montluçon et les Montluçonnais.
Comment pouvaient-ils espéraient un peu de respect quand ils n'honoraient même plus leurs morts?!

Serrant les dents et les poings, elle déglutit et inspira fortement plusieurs fois.
Elle n'était pas prête d'oublier cela, oh ça non!
Mais ce n'était pas le moment, chaque chose viendrait en son temps.
Un petit courant d'air agita le bas de sa soutane, frais et léger comme une caresse, et avec lui, sa colère fondit, au moins pour le moment.
Surprise de s'être laissée ainsi aller à la colère, elle se demanda d'où venait le courant d'air sans trouver la réponse.
Elle laissa donc tomber, mais l'amertume était bien restée.
Elle savait maintenant que si Montluçon pouvait compter sur son soutien, elle ne pouvait en revanche compter sur le soutien des Montluçonnais, et que ses amis n'en avaient en fait que le nom, faute de l'être réellement.

Sur un petit signe de tête, un groupe d'enfants avec qui elle avait l'habitude de travailler pour ce genre de cérémonie prirent place à la droite du cercueil, face à "l'assemblée", puis ensemble, entamèrent en sourdine l'Introïtus du Requiem tandis qu'elle même rejoignait sa famille.
Elle sera sa fille et son époux dans ses bras, les étreignant avec la force de son chagrin insondable.
Puis alors que les dernières notes du chant retentissait, elle les lâcha puis alla se placer derrière le catafalque ou sa soeur reposait, le visage serein.

"Mes chers frères, mes chères soeurs, chers amis ici présents pour célébrer la mémoire de Celeste_neesan, ma soeur bien aimée, et marcher à ses côtés une dernière fois, aujourd'hui est un triste jour.
Aujourd'hui est le triste jour où nous rendons hommage à ce que fut la vie bien remplie de Celeste_neesan.

Prions ensemble pour elle et son souvenir..."

Les mains jointes, elle ferma les yeux et baissa la tête en signe de recueillement, et plus prosaïquement, pour refouler les larmes qui menaçaient de déborder à nouveau. La voix tremblotante, elle continua:

"L’Homme fait de terre et d’eau est par nature attiré par le centre de la terre, mais l’amitié vrai élèvera son âme et si elle est digne de rejoindre le seigneur elle ne s’enfoncera pas comme le corps vers le feu des enfers mais au contraire elle trouvera sa vraie nature qui est de s’élever vers notre seigneur."

Deux jeunes filles se détachèrent du choeur et vinrent la rejoindre, se plaçant autour d'elle.

"Après tous nos regards qui ont croisé le sien, qu’il puisse enfin voir le tien Seigneur!"
"Seigneur ne détourne pas ton regard de notre ami", répondirent-elles en coeur.

"Après l’amitié qu’il a reçu et qui a guidé sa vie, accorde lui l’amitié ultime qu’est la tienne Seigneur!"
"Seigneur ne détourne pas ton regard de notre ami"

"Après les peines et les larmes qui ont obscurci sa vie, illumine sa route pour l’éternité"
"Seigneur ne détourne pas ton regard de notre ami"

"Seigneur, nous tournons vers toi nos espoirs à l’heure où disparaît le corps de l’ami qui nous est cher
Accorde-nous l’espérance de le revoir auprès de Toi pour les siècles des siècles.

Amen"

Le silence retomba lourdement dans l'église.

"Mes frères, mes soeurs, si nous sommes ici réunis, c'est pour entourer de notre amitié une famille qui est dans la peine. C'est aussi pour nous rappeler que Dieu se souvient de tout ce qu'il y a eu de bien dans la vie de notre frère et de lui demander de lui faire bon accueil."

Les deux jeunes filles se munirent chacune d'un cierge et allumèrent plusieurs dizaines de bougies disposées autour du cercueil, dans le plus grand silence.
Elles reprirent leur place tout aussi silencieusement.
La diaconesse regarda brièvement les personnes présentes... son époux... sa chère fille qui avait été si proche de Celeste... le signe de la lumière pouvait être un moment de la cérémonie difficile à passer, la lumière éclairant le visage de cire du défunt. Certaines personnes très sensibles n'étaient pas à même de le supporter.

"L’Amitié est la lumière du monde c’est la flamme qui réchauffe notre cœur.
Quelle éclaire maintenant la route de Celeste_neesan qui le conduit maintenant au Royaume de Dieu !"

Elle se retourna vers l'autel où elle prit une croix de bois ciselée et marquetée, qu'elle posa sur le cercueil:

"Celeste_neesan, nous déposons cette croix aristotélicienne sur ton cercueil.
Cette croix est le signe qui relie Aristote et le Christ, qu'elle soit pour toi signe de salut et de vie éternelle"

Elle se releva fit un signe à une des jeunes filles qui fila chercher une corbeille déposée à l'entrée en début de cérémonie. Elle regarda son époux mais celui-ci berçait doucement Camille, bouleversée, dans ses bras.
Elle remercia la demoiselle qui la lui remis puis s'approcha du cercueil, corbeille en main.

Le signe des amis... ce moment où un ami ou une personne extrêmement proche déposait sur le cercueil la corbeille pleine de denrées alimentaires, en symbole de l'amour réuni de toutes les personnes présentes pour le ou la défunte.
Une fois fait, elle repris, d'une voix modulée:

"Celeste_neesan, nous déposons ces présents sur ton cercueil, signe de notre amitié, signe de notre prière, signe de notre cœur.

Cet enterrement nous rappelle plusieurs choses :
- Le souvenir d'une Amie aristotélicienne qui vient de nous quitter. D'un femme qui avait une histoire, unique, avec Dieu. Qui était entourée de tendresse par Dieu. Qui a fait, ou non, l'expérience de cette tendresse.
Nous voici dans cette chapelle, autour de Celeste_neesan, pour prendre conscience de ce lien d'amour qui l'a toujours unie à Dieu, qui unit Dieu à chacun de nous, à tout instant.
- La mort viendra pour chacun de nous, pour les uns tôt, pour les autres plus tard. Pour les uns dans leur jeunesse, pour d'autres dans leur vieillesse.
Le Seigneur nous prévient : "Soyez prêts, soyez toujours prêts car vous ne savez ni le jour ni l'heure".
Aristote nous a guidé et Jésus Christ nous invite à prendre exemple sur lui, à trouver notre joie à vivre pour les autres, à aimer comme ils nous ont aimés.
Notre présence ici est prière. Comme le bon larron, nous invoquons Aristote qu’il mesure les péchés de notre soeur et que Jésus intercède auprès du seigneur pour qu’il le reçoive en son Paradis."

Nouvelle pause de quelques secondes.

Venait maintenant le moment le plus difficile, celui au cours duquel le corps de sa soeur serait rendu à la terre et redeviendrait poussière fertile, son âme ayant déjà rejoint le Très-Haut.

A cette occasion, souvent les proches prenaient pleinement la mesure de ce qui les attendait: l'absence, tandis que le cercueil disparaissait en terre.

Mais c'était incontournable... bien qu'elle et sa famille n'échapperaient pas à la règle. Elle espérait seulement que sa fille pourrait le supporter, prête à la faire rentrer au moindre signe annonçant le contraire.

"Avant de quitter l'église, nous allons dire un dernier adieu à notre Soeur Celest_neesan.
Avec respect et affection, confions-la à Dieu dans l'espérance de nous retrouver un jour auprès de Lui."

Le silence s'accrut encore.

"Avec tous ceux qui nous ont précédés et qui vivent déjà auprès du Seigneur,
avec l'immense cortège des saints, nous souhaitons un bon dernier voyage à son enveloppe charnelle."

Elle quitta le lutrin et fit signe aux hommes qui avaient porté le cercueil jusqu'à l'église qui s'en emparèrent avec une délicatesse infinie.
En tête de cortège, devançant le cercueil, elle prit alors la route de la dernière demeure de Celeste_neesan, chez elle, à Virargues, auprès des siens, suivie par les personnes présentes à la cérémonie.

Elle s'etait habillé de sombre aujourd'hui, exite la belle tenue rouge qu'elle affectionnait tant.

Aujourd'hui elle allait rendre hommage a Celeste, elle l'avait peu connu mais etait peiné de son deces.

Elle pensait au chagrin de sa sakunette, ca faisait un sacré moment qu'elles ne s'etaient pas revu mais elle l'aimait toujours autant et parfois le manque se faisait sentir.

Elle se glissa discretement dans l'eglise, le capuchon rabattu sur la chevelure flamboyante et gagna sa place favorite au fond de l'eglise.

Quant Ce;este fit sa derniere entrée en ces lieux, elle fut prise d'un frisson glacé

Elle jetta un oeil autour d'elle discretement, peu de monde avait fait le deplacement, personne d'ailleurs et elle en fut peiné pour saku, la pauvre devait etre amer.

Elle suivi la ceremonie, le regard fixé sur la douleur de son amie puis se leva au passage du cerceuil afin d'accompagner la charmante Celeste a sa derniere demeure.
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